L’exposition militante de la Fondation Boghossian a […] choisi de centrer son propos plastique sur deux artistes emblématiques, les frères Baalbaki, quintessence (avec leur cousin Oussama Baalbaki) des enjeux de la jeune scène libanaise. Désirant susciter, sans ressentiment aucun, « la tête dans les étoiles », la création d’images d’archives, Ayman Baalbaki se souvient qu’il est né en 1975, l’année du déclenchement de la guerre. Il travaille au corps à corps et aux vies à visages les cicatrices du passé, en édifiant d’envahissantes installations d’objets en même temps que de violentes séries de peintures matiéristes. Il ne craint pas de peindre de grandioses portraits de combattants anonymes, masqués d’un keffieh sanglant ou d’une cagoule noire, ou encore de saisissants immeubles éventrés par les bombardements, criblés d’impacts de balles et d’obus, dont on ne voit plus que les carcasses grises. Les bâtiments, s’allongeant telles des odalisques en béton sur de luxuriants tapis aux mille fleurs, existent ou ont existé, au gré des pérégrinations de la famille Baalbaki fuyant les combats, avant d’être reconstruits, encore et toujours, sur les ruines de la guerre, dans de nouveaux projets d’urbanisation galopante.

Extrait de l’article d’Emmanuel Daydé publié dans le n°48 de la revue Art Absolument : parution le 29 juin 2012

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